La Lettre écarlate, de Nathaniel Hawthorne

la-lettre-ecarlate-coverQuatrième de couverture

La lettre écarlate, c’est la marque au fer rouge qui désigne la femme adultère dans l’Amérique du puritanisme obsessionnel de l’époque coloniale.
Trois personnages : Hester qui vit avec une dignité admirable sa faute et sa solitude. Arthur Dimmesdale, le jeune pasteur dont les élans mystiques soulèvent à Boston l’enthousiasme des fidèles mais qui, ensorcelé par Hester, ne parvient ni à dominer ni à vivre sa sensualité. Chillingworth, le mari, qui pendant des années tourmentera en silence le pasteur jusqu’à la folie et la mort.

Critique

Pour combler mes lacunes en classiques, il ne fallait pas que je m’en tienne seulement qu’aux classiques français, qui sont pourtant majoritaires – si ce ne sont pas les seuls, comme c’était mon cas – à être imposés comme lectures au collège et au lycée. Et à part les contemporains américains, je n’avais jamais lu de classique venant de ce pays. Et en tant que classique, j’entends les œuvres vieilles de plus de 100 ans. (mais ton tour viendra bientôt, Hemingway, ne t’en fais pas)

Pour cela, j’ai donc choisi sur un très bon conseil de m’atteler à la lecture de La Lettre écarlate de Hawthorne. Je partais sur ce livre sans a-priori mais sans grand enthousiasme non plus. Cette neutralité aura eu le mérite de me faire apprécier l’histoire, et même plus que je ne l’aurais prévu.

Je dois avouer que j’ai traîné à lire le prologue. Celui-ci est plutôt autobiographique et n’a pas forcément de rapport avec l’histoire, ce qui m’a donné l’impression de perdre mon temps dès le début. Mais j’ai persisté et il y a quand même un intérêt certain à le lire : celui-ci, comme le reste de l’histoire par ailleurs, nous donne quelques faits sur le fonctionnement de l’époque, ainsi que sur la vie de l’auteur et ses réflexions tout autour. Le plus important étant quand il nous explique comment il en est arrivé à écrire ce roman et qu’il nous avoue qu’il s’est inspiré d’une histoire vraie sur laquelle il est tombé durant son travail à la douane.

Je vais maintenant passer à l’histoire et parler de Hester et de son « crime » : celle-ci, sans nouvelles de son mari, va finalement s’enticher d’une autre personne, ce qui est considéré comme une autre trahison, d’autant plus que de cette union va naître une enfant, nommée Pearl. Toute sa vie durant, Hester va devoir porter la marque de sa faute : un A (pour « adultère ») écarlate brodé sur sa poitrine. Et cette femme est juste admirable et incroyablement forte. Je la trouve très digne et elle porte son stigmate sans fierté mais sans que sa culpabilité ne soit trop prononcée non plus. Elle n’est pas arrogante pour autant, elle est même plutôt modeste. Rien que pour elle, lisez ce livre.

Dans cette histoire, on est surtout plongé dans la société de l’époque, peu après que les colons aient finalement colonisé la partie est de l’Amérique. Le puritanisme y est aussi très fortement établi et les sanctions extrêmement sévères à l’encontre de celles et ceux qui désobéissent à ces règles. D’ailleurs, lors du passage de Hester au pilori pour subir une séance d’humiliation, les autres femmes ne se gênent pas pour dire que celle-ci mérite de mourir plutôt que de simplement vivre avec la culpabilité de sa faute. Bonne ambiance.

Et j’ai trouvé cette histoire absolument passionnante : les personnages sont tous bien présentés et ont chacun leur singularité propre et certaines réflexions tournent justement autour d’eux, notamment en lien avec ce fichu puritanisme et ses contraintes. J’ai été assez soufflée de voir que l’auteur parlait sans broncher d’un temps qui viendrait où les femmes pourraient prétendre à un traitement égalitaire avec les hommes. (oui, ben le bouquin est sorti en 1850, on ne peut pas dire que les droits des femmes étaient à la fête, d’où mon étonnement) Tout était magnifiquement bien décrit, des bâtiments jusqu’aux étoffes.

Chillingworth et Pearl sont des personnages qui ont rendu les choses très angoissantes, au point que ça m’a légèrement fait penser à Les Hauts de Hurlevent de Emily Brontë. (bien que la folie des personnages de ce roman reste inégalable) Il y aussi une très forte présence de la religion qui aurait pu me rebuter, mais il n’en a rien été, j’ai même trouvé la façon dont l’auteur traitait le sujet fascinante. De mon point de vue, ça ne faisait que rajouter de l’ampleur à ma fébrilité. La religion et son carcan ne font que mettre en avant le conformisme des gens et surtout, leur méchanceté et leur hypocrisie vis-à-vis de Hester.

J’ai aussi énormément aimé le personnage du pasteur, Dimmesdale, qui, à part Hester, est le personnage le plus passionnant de ce récit. Certains pourraient répliquer qu’il a aussi été extraordinairement faible, mais je trouve justement que son personnage a le mérite de faire réfléchir sur des sujets que je ne spoilerai pas ici.

Le point qui a aussi été très positif durant ma lecture, c’est l’écriture. A certains moments, l’auteur faisait usage du « nous », ce qui était aussi une manière de nous impliquer un peu plus dans l’histoire. D’une certaine manière, il y avait une sorte de familiarité qui me plaisait beaucoup et qui ne me semblait pas malvenue. De plus, les descriptions ne sont ni lourdes ni trop longues. (j’ose même dire qu’elles sont proches de la perfection)

Pour conclure, je n’ai pas trouvé que c’était austère malgré l’époque qui rend les évènements assez effrayants aux yeux des contemporains. C’était très intéressant de voir la sévérité de l’époque envers les femmes (et certaines choses n’ont pas bien changé à mon avis…) et la façon dont le pasteur a vécu son péché. De plus, je le trouve simple à lire, je le recommanderais comme livre afin de débuter les classiques pour les réfractaires.

7 réflexions sur “La Lettre écarlate, de Nathaniel Hawthorne

  1. Merci pour cette chronique super bien construite qui donne envie, d’autant plus que je n’ai jamais entendu parler de ce titre. Le côté peinture d’une époque me tente beaucoup, surtout que le sujet du puritanisme n’est pas forcément celui que je maitrise le mieux car je pense que c’est très propre aux Etats Unis et je dois dire que ma culture des classiques se borne aux français.

    Aimé par 1 personne

    • Oh merci, ça me fait plaisir ! (quand je l’ai relu, je ne l’ai pas aimé, mais bon, quand c’est publié, c’est trop tard)
      Ce n’est pas autant « peinture d’une époque » qu’on pourrait le croire (c’est plus centré sur l’histoire de Hester) mais on voit bien assez d’éléments à travers les personnages pour se dire qu’on est chanceux d’être dans notre monde contemporain :’)

      J’aime

    • PS : Je rajouterai que c’est plus l’aspect psychologique ds personnages à cette époque qui est intéressant. La peinture de l’époque reste assez légère. (ce n’est pas du Zola en fait) Bon, je me suis peut-être plantée dans mon enthousiasme en fait xD

      J’aime

  2. La lettre écarlate ça a été une magnifique surprise pour moi surtout de découvrir le personnage de la petite Pearl et son talent pour transmettre les émotions et les descriptions des lieux, des espaces comme si dieu était là dans toute choses naturelles.

    Aimé par 1 personne

    • Je suis très contente qu’il t’ait plu ! 🙂 Effectivement, la présence sous-jacente d’un dieu ne m’a pas dérangé cette fois-ci (ça a plutôt tendance à me rebuter d’habitude), ça contribue même à une ambiance assez particulière qui m’a beaucoup plu.

      J’aime

      • Oui, je l’ai remarqué aussi et dans cette histoire, ce n’est pas plus mal qu’il ne donne pas son grain de sel. Nous sommes donc les seuls à juger en fait, sans intervention extérieure, mais je pense que le fait que l’auteur lui-même n’intervienne pas nous amène aussi à l’indulgence envers les personnages.

        J’aime

Laisser un commentaire