Un peu en retard pour ce bilan, je n’étais pas chez moi et j’avais clairement d’autres priorités.
Mais j’ai quand même un sacré bilan à vous offrir, donc ça serait dommage de ne pas vous en faire profiter ! Je ne pensais pas pouvoir faire ça avec mon problème personnel, mais je m’adapte. Je suis ravie !

C’est donc parti !
A Journey Beyond Heaven, tome 5 et 6 (Masakazu Ishiguro)

Des tomes globalement de meilleure qualité que le troisième et le quatrième. C’est pas plus mal car j’avais peur de commencer à m’ennuyer. Par contre (je vais spoiler un peu), j’en ai marre du viol comme ressort scénaristique. Je vous avoue que ça m’a passablement énervé et qu’une remarque mesquine mais vraie m’est passé par la tête : ça se voit que ça a été écrit par un homme cis. Bref, je vais continuer la lecture de ce manga en restant sur mes gardes.

Une histoire de genres (Lexie) Lire la chronique
Un livre sur les transidentités avec une foule d’informations pour mieux cerner le sujet, avec le ton bienveillant et pédagogue de l’autrice. Un ouvrage nécessaire dans notre société binaire.

Langue (Cécile Canut)
Vu le concept que ça reprend, ça n’a pas l’air super intéressant… et en fait si ! On reste centré sur la langue française donc si vous voulez des informations sur d’autres langues, il va falloir lire autre chose. L’autrice nous montre à quel point la langue est empreinte d’idéologie de par son usage, ce qu’on lui impose, l’outil à quoi elle peut servir (comme durant la colonisation par exemple où elle sert d’officialisation de la puissance coloniale et de l’effacement des cultures présentes avant). Et à quel point la force de l’élitisme est forte dans notre langue française et à quel point les élites veulent la contrôler, et par la même, contrôler les masses, établir une hiérarchie par la langue. Elle parle aussi de la novlangue, concept utilisé à tort et à travers, surtout pour parler de l’opposé. Et on en vient à un concept plus moderne de colonisation de la langue par le néolibéralisme : beaucoup de termes sont utilisés dans ce langage-là pour euphémiser, atténuer voire supprimer la violence de certaines paroles, certains actes. Exemple très parlant avec « plan social » à la place de « licenciement »… En gros, nos pratiques langagières traduisent une certaine vérité de notre monde. Bref, avec ce petit paragraphe, vous avez sûrement compris l’intérêt de ce livre, qui ne paye pourtant pas de mine avec ce sujet mais qui apprend beaucoup de choses.

Asadora !, tome 6 (Naoki Urasawa)
Si le tome 5 ne nous laissait pas de répit, celui-ci est une pause tout en avançant malgré tout, mais à un rythme moins trépidant. Urasawa sait y faire pour qu’on reste accroché même quand c’est plus lent : ce qu’on voit à la fin, là…

Le droit du sol : journal d’un vertige (Etienne Davodeau)
Une BD que je ne m’attendais pas à autant apprécier en la feuilletant : j’étais sceptique sur le choix du noir et blanc et le dessin me plaisait moyennement (ça, c’est personnel). Par contre, le voyage de l’auteur de Pech Merle dans le Lot à Bure en Meuse (vous savez, là où on veut enterrer des déchets nucléaires) est super bien raconté, c’est vraiment immersif, on suit l’auteur avec plaisir dans ce parcours somme toute banale, avec sa fatigue, ces paysages qu’on connaît parfois, les personnes qu’il croise. On l’accompagne dans ses réflexions qui nous amènent à réfléchir sur nous, notre société, l’humanité en général. Et si vous êtes pro-nuke, vous pouvez aussi passer votre chemin car il s’agit de réfléchir sur le nucléaire et ses déchets. De toute façon, c’est trop tard, ils sont là, il faut bien en faire quelque chose. Mais est-ce que les enterrer est une solution viable ? Techniquement, ce n’est déjà pas autant le cas qu’on voudrait nous le faire croire, alors éthiquement… D’ailleurs, il semblerait que démocratie et nucléaire ne soient pas très compatibles, ahem… Tout le long de son voyage, il repensera à des entretiens qu’il aura eu avec différentes personnes au sujet de Bure et du nucléaire, sur différents aspects, on y apprend plein de choses. J’ai trouvé cette BD très émouvante, très humaine. L’auteur a su me faire changer d’avis sur mes craintes, bravo à lui. J’espère, comme lui, que sa BD restera longtemps dans le temps, qu’elle continuera à être lue, c’est important.

Handi-gang (Cara Zina)
Un adolescent handicapé en fauteuil roulant, Sam, qui est dans l’année de passer son bac, se révolte contre le validisme et l’inaccessibilité. Il n’est pas le seul et avec d’autres personnes, il se retrouve dans un local militant où ils créent le Handi-gang, groupe de personnes handicapées majoritairement (avec quelques personnes valides qui ont leurs raisons d’être là aussi). Si le début se passe bien avec des opérations militantes chocs qui embêtent mais ne blessent personne, plus tard ça va se corser. Le roman pose des questions intéressantes sur le militantisme (et ce de manière général), est-ce que la fin justifie tous les moyens ? Est-ce que la colère et le sentiment d’injustice doivent forcément amener au pire (blesser des gens, voire les tuer) ? De plus, ça apporte aussi la question de la cohésion du groupe, ce genre de questionnements. Tout le monde n’est pas forcément d’accord. Si le livre intéresse au point de vue handi, à des points de vue différents des personnes valides (je n’en suis plus une mais breeef), il fait aussi se poser des questions sur le militantisme. On suit aussi l’histoire d’une personne valide, la mère de Sam, qui doit être un peu la mère dont toutes les personnes minorisées rêvent. J’ai pas dit qu’elle était parfaite, attention. Sam ne l’est pas non plus ceci dit, et j’ai aimé voir ses défauts aussi. Bref, le livre n’est pas manichéen et lourd, j’ai beaucoup aimé ma lecture, bien que l’écriture ne soit pas remarquable.

Nos existences handies (Zig Blanquer)
J’ai beaucoup aimé lire ce livre. Il a été rédigé par une personne handicapée (l’auteur est tétraplégique). C’est un recueil de textes qu’il a rédigé au fil des années (on y trouve les dates) et il est triste de constater que ses propos sont toujours d’actualité. Le validisme et ses effets qui y sont dénoncés me parlent en tant que nouvelle personne handicapée mais mon ancien moi valide physique est toujours dans le coin pour se sentir visée, aha. Et comme on me voit encore comme valide, je pense que certains propos me concernent toujours. Je trouve cette lecture salutaire, nécessaire. Même pour vous qui vous dîtes « buarf » ou « bof ». L’auteur y parle de plein de choses, dont la sexualité « handie », le rapport au corps, l’institutionnalisation, etc. Clairement, ses réflexions sont très pertinentes, cela m’a fait réfléchir. Je comptais déjà le faire mais je vais gueuler quand je vois de l’inaccessibilité (je regarde déjà s’il y a bien le macaron sur une voiture garée sur une place handicapée depuis des années mais pas assez de courage pour rayer la bagnole quand ce n’est pas le cas) mais aussi du validisme basique. Ce livre incite à la remise en question. L’auteur y tient des propos intelligents sans mâcher ses mots. Une lecture que j’ai énormément apprécié.

La maladie comme métaphore (Susan Sontag)
Il y a deux textes dans cet ouvrage : La maladie comme métaphore et Le sida et ses métaphores. Je vais d’abord vous parler du premier. Il m’a un peu surprise de par sa focalisation sur la tuberculose et le cancer mais vu ce qu’il y a à dire sur les représentations qu’on a donné/donne à ces maladies, ce n’est pas hyper surprenant. Je pensais que ce serait plus général mais justement, c’est plus l’exception que la règle, aha. J’ai trouvé ça très intéressant, on y trouve beaucoup de références, et pas que littéraires, même si on y lit beaucoup de ces dernières. On sent que l’autrice a bossé sur ces deux maladies. Elle montre que toutes les métaphores médicales ne sont pas bonnes à dire et qu’elles sont même contreproductives pour les personnes qui ont ces maladies. Ensuite, j’ai lu Le sida et ses métaphores : le tout début du texte reprend ce que disait l’autrice dans le texte précédent en plus général. C’est là aussi où on apprend que l’autrice a eu un cancer (dont elle a guéri) et qu’elle s’est intéressé à ce sujet à cause de ça. Ça m’évoque une réflexion et je m’inclus dans la critique : en fait, on s’intéresse au validisme quand ça nous concerne et c’est bien dommage. C’est pour ça que ce dernier continue en toute impunité… On voit que les paniques autour du sida ont servi des intérêts idéologiques, et pas que politiques. L’autrice était aussi consciente du racisme derrière certaines postures morales vis-à-vis du sida. Pas mal pour une blanche. Ce texte m’a plus plu mais sûrement parce que le sida m’est plus contemporain que la tuberculose mais les deux textes sont intéressants et on y apprend plein de choses, on se pose des questions.

Salina les trois exils (Laurent Gaudé)
Un roman brillant. Avec Laurent Gaudé, c’est souvent le cas, même s’il a parfois des ratés, qui restent dans la catégorie des bons livres de toute façon. J’ai pas tout lu de lui mais je ne m’attends jamais à être déçue. Selon moi, celui-ci fait partie de ses meilleurs. Salina, vous vous en doutez, est le personnage le plus important de cette histoire, de ce conte même (la comparaison avec La mort du roi Tsongor n’est pas usurpée), accompagnée de son fils Malaka qui raconte son histoire. Ses trois exils. Quels sont ces trois derniers ? Les deux premiers sont synonymes de souffrance, le troisième aussi mais est aussi porteur d’une émotion autre. En tout cas, ce récit m’a beaucoup émue et je n’en menais pas large en lisant le troisième exil. Je ne dis rien de plus : je pourrais vous dire quelle est la nature des trois exils mais je préfère que vous découvriez cela lors de votre lecture. Au moins, je peux dire quelques mots sur le début de vie de Salina : apportée par un cavalier qui dépose son corps de nourrisson au pied d’habitants d’un village quelconque, ces derniers attendent que le soleil ou les hyènes la tuent, ayant peur d’elle, mais une femme nommée Mamambala en décide autrement et décide de la recueillir et de l’élever. Salina ne sera toujours vue que comme une étrangère au sein de son village et beaucoup voudront la soumettre, en sous-estimant évidemment sa force de caractère… Voilà où l’histoire va commencer. Un roman plein d’émotions, émouvant malgré la violence, l’esprit de vengeance, la solitude et la souffrance, avec une pointe de fantastique comme sait si bien le faire l’auteur. Aussi une histoire de transmission. (Coline, c’était super – les deux fans)
J’ai aussi lu le dernier journal d’Alternative Libertaire, Imaginaires libertaires, et le magazine hors-série de l’Obs, Penser l’écologie.

Le journal d’Alternative Libertaire est vraiment bien. Le dossier spécial était vraiment intéressant et le reste nous fait garder les pieds sur terre je trouve, on apprend des choses des luttes de tous les jours et on voit que tout le monde (ou presque) est pris en compte.
Le magazine, quant à lui, est plutôt cool, sans être parfait. Il part d’un point de vue de l’évolution de l’écologie dans l’histoire. Après, malgré des efforts d’inclusion de femmes (blanches : Rachel Carson, Vinciane Despret…) et un article sur l’écologie décoloniale, ça reste plutôt masculin blanc tout ça.
J’ai aussi fait un petit bilan de mi-année à travers un TAG, si vous ne l’aviez pas vu !
Bref, comme vous le voyez, un très bon mois. J’espère que le mois d’août sera presque aussi bon !
Je note Langue, le sujet m’intéressant beaucoup !
Bon mois d’août 🙂
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Ah ben j’aurais jamais cru qu’il attirerait l’attention, celui-là !
Et bon mois d’août à toi aussi !
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J’imagine que ce n’est pas la thématique la plus populaire mais je la trouve importante…
Merci 🙂
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Coucou ! Quel mois riche en lectures, trop chouette ! Je lis aussi « beaucoup » cet été (par rapport à mon rythme habituel). Depuis deux semaines je me suis remotivée pour lire de la BD : c’est un genre que j’exclus (parce qu’il n’y a pas assez de mots) alors que c’est un superbe moyen de communication, autant que les romans et les essais ! Récemment, l’une de mes amies a aussi beaucoup aimé lire ce Davodeau ! De quoi valdinguer les discours de Jancovici hihihi !! Du coup, des BD vont (re)venir sur Bibliolingus 😀 Quant au handicap, j’ai Handi-Gang sur ma liseuse (offerte par cette même amie, tiens tiens), mais je trouve qu’ensuite, l’écriture de la chronique est plus complexe à partir d’une liseuse. Mais heureusement il est à la bibliiiiii ! A bientôt !
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Salut ! Oui, la BD est une excellente introduction à la lecture, puis ça permet souvent de sortir d’une panne de lecture. T’as de bonnes lectures de BD ?
Et oui, cette BD est en plus moins connue que celle à laquelle a participé Jancovici… Nuuul !
Toi aussi tu préfères le format papier ? En plus, c’est plus pratique si tu veux feuilleter le sommaire du livre pour ta chronique.
À bientôt !
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Ton bilan est super intéressant ! Tu avais déjà attiré mon attention sur Une histoire de genres, mais là, presque tous les autres m’intéressent aussi ! Et en prime, tu me rappelles qu’il faut que je continue Asadora.
Je te souhaite autant de bonnes lectures en août !
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Héhé, merci !
Ah ben oui, faut continuer à lire Asadora ! (tu devrais le trouver le 6e tome maintenant, il y avait des problèmes de livraison à sa sortie)
Et j’espère que le mois d’août sera aussi beau, oui 🙂
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Je ne les achète pas, je les emprunte à une amie de toute manière ! ^^
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Ca permet d’économiser et de ne pas s’encombrer 😀
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Oui, et puis, je suis une lectrice occasionnelle de mangas. Je lis quelques séries, mais je ne suis pas une passionnée. Et j’achète déjà peu de livres qui me font super envie, ce n’est pas pour investir dans des séries potentiellement à rallonge qui me lasseront peut-être avant la fin ! ^^
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J’avais lu « Une histoire de genres » et j’avais beaucoup aimé !
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Ah oui, il est génial ! Je l’ai prêté à ma soeur ! Une lecture nécessaire !
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Pareil, je l’ai aussi prêté à ma sœur 😊
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Les grands esprits se rencontrent x)
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Ahah oui ^^
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Beau bilan !
Même si ce n’est pas le genre de livre vers lequel je me serais tournée spontanément, Langue me tente bien !
J’ai aussi lu Le droit du sol récemment, et en plus d’être une mine d’informations, cette bd m’a touchée beaucoup plus que ce que je m’y attendais !
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Déjà la deuxième commentaire qui me dit que « Langue » donne envie, je m’y attendais pas…
Sinon, je te rejoins pour « Le droit du sol » ! Je ne m’y attendais pas non plus ! (on remarquera que je m’attendais à rien quand on lit mon commentaire)
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Je me doutais que la scène de viol de A Journey poserait problème, on en avait parlé.
Concernant Asadora, j’ai lu le tome il y a quelques jours, et malgré la pause dans le récit je reste conquis, j’aime bien la façon dont Urasawa sait prendre son temps.
Le livre documentaire sur le genre est un achat prévu pour la mediatheque, tu n’es pas la seule à le recommander.
Excellent mois d’août à toi !
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Oui, on en avait discuté pour « A journey beyond Heaven ». (j’étais pas contente xD)
Oui, Asadora, pareil, même quand c’est une pause dans le récit, ça garde sa qualité. Un très grand auteur, cet Urasawa !
Aaah, trop bien si vous allez l’acquérir ! Vous avez eu de la demande aussi ?
Bon mois d’août à toi aussi !
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Non, je ne vais pas te cacher qu’on a aucune demande sur ce genre d’ouvrage et que je ne suis pas convaincu que globalement les mentalités en sont là, mais si ça peut parler à quelques personnes ou contribuer à ouvrir le dialogue, ça me va. Et comme je crois qu’on n’a aucun contenu sur cette thématique, ce serait un oubli en partie réparé.
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Oui, si vous en avez déjà un (et accessible), c’est déjà bien.
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