Féminismes islamiques, de Zahra Ali – les livres féministes #37

Ceci est une relecture dans le cadre de mon deuxième mois relecture. Je l’avais lu pour la première fois en 2013, j’étais encore une petite conne islamophobe mais la différence avec les racistes purs et durs, c’est que je me posais des questions. Et en particulier sur le voile. Mon avis n’était pas arrêté tant que je n’en savais pas plus.

Hé bien… A part dans la conclusion à la fin du livre, ça ne parle jamais du voile, ce qui montre bien que ce n’est une problématique qu’en France (et qui date de la colonisation pour le point culture). Et ce dont ça a parlé de toute façon… Je n’avais pas besoin de propos plus spécifique. Comme je l’ai plus ou moins dit, j’avais des préjugés islamophobes et cet essai a mis les choses en ordre dans ma tête.

L’autrice y a compilé des textes et des entretiens avec des spécialistes (au féminin) de différents pays musulmans (y a pas que le Moyen-Orient dans la vie), l’Égypte et la Malaisie entre autres. Cela a commencé avec les bases de ce qu’est le féminisme islamique, qui n’est pas la même chose pour tout le monde. Certaines personnes pourraient s’en revendiquer mais ne le font pas car elles ont un problème pour se qualifier en ce terme.

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Corset de papier, de Lucie Barette – les livres féministes #36

On sait que les magazines féminins d’aujourd’hui sont craignos mais y a-t-il une aussi grosse différence avec les premières revues du 19ème siècle ? Quel est véritablement leur rôle ?

Et à quel moment être une femme est-il devenu une spécialisation nécessitant sa propre presse ?

Une très bonne question, à laquelle n’importe quelle féministe peut répondre…

Vous vous dîtes peut-être « Mouais, ça va, on connaît » mais je ne suis pas d’accord. C’est intéressant de voir comment ça se passait au 19ème siècle comparé à maintenant. Vous allez voir qu’à part la morale religieuse (y a d’autres morales aujourd’hui), tout est quasi identique au contenu actuel. La forme change mais le fond reste. Ça s’adapte vite fait aux évolutions de l’époque mais l’objectif reste bien le même, quitte à passer sous silence certaines choses. La cible principale est toujours la même aussi : blanche et bourgeoise.

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Précis de culture féministe pour briller en société patriarcale – les livres féministes #35

L’autrice, Sabrina Erin Gin, est surtout présente sur Instagram sous le pseudonyme de @olympereve mais vous pouvez aussi la trouver sur Twitter. Mais l’essentiel de son travail se trouve sur Instagram.

Je vous avoue être un peu méfiante des publications d’influenceuses sur Instagram. Pas que j’en n’ai pas déjà acheté, hein, mais la qualité n’est pas toujours très bonne (sauf La révolution du potager, héhé, et d’autres que j’oublie sûrement) donc je ne savais pas encore trop si j’allais l’acheter. Puis je me suis dit que Sabrina fait un travail remarquable, et puis je savais déjà ce dont elle est capable, ayant lu son texte dans Nos amours radicales. Et puis le concept du livre avait l’air intéressant.

Des anecdotes historiques mais aussi contemporaines sur des faits (occidentalo-centrés) qui montrent à quel point le patriarcat nous enferme, et pas que dans le passé. Mais aussi, comme le titre du livre l’indique, on montre à son interlocuteureuse qu’on connaît des trucs. Adieu le « on n’a plus besoin du féminisme aujourd’hui » !

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Révolutionnaires, d’Atelier des passages – les livres féministes #34

Ceci est un recueil de six témoignages de militantes de tout horizon : Uruguay, Italie, France, Suisse, Allemagne. Elles ont commencé à la fin des années 50, ou pendant les années 60. Ces militantes racontent leur histoire, que les personnes qui ont recueilli leur parole ont dû se préparer à convaincre à en dire le plus possible. Vous connaissez cette tendance à penser qu’on n’a rien fait de remarquable ? Ces militantes n’échappent pas au syndrome de l’imposteur. Et puis elles n’ont rien fait de viril, donc forcément, c’est moins bien aux yeux de beaucoup…

Ceci dit, à part dans l’introduction, on ne ressent pas ce manque de confiance en elles lors des témoignages. En même temps, elles méritent mieux que ce qu’on retranscrive ça (c’est juste mon opinion).

Elles ont participé souvent à la lutte des classes mais pas que : féminisme, écologie, droits des migrants, etc. Elles vont parler de leur vie d’engagement qui m’encourage en partie (à part une, elles avaient toutes un contexte familial de gauche). C’est très instructif, et pas qu’à propos de l’extrême-droite. Ça mettait souvent des bâtons dans les roues à ses alliées pour ses intérêts personnels, car dans le fond, certaines personnes « de gauche » ne pensent qu’à elles et sont en réalité capitalistes (ça dénonce par ici !). Donc faut éviter de dire la vérité si ça met ton employeur en face en porte-à-faux, tu risques la placardisation. Ou d’être viré·e… On comprend leur fatigue, elles ont vécu ça pendant des dizaines d’années et parfois ce sont leurs vies entières qui ont été impactés. Les syndicats sont pointés du doigt, et en même temps leur rôle d’instruments est toujours dit nécessaire par ces militantes.

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Hilaria, d’Irene – les livres féministes #33

Si vous êtes sur Instagram, vous connaissez sûrement Irene (prononcez Iréné), mieux connue sous le pseudo @irenevrose. J’ai déjà parlé de son premier livre d’elle, La terreur féministe.

Voici le deuxième livre rédigé exclusivement par elle. Celui-ci va être divisé en quatre parties : le féminisme contre le capitalisme, le féminisme contre la prison, le féminisme contre le fascisme et le féminisme anarchiste. Tous ces chapitres seront rapprochés de l’histoire de son arrière-arrière-grand-mère, Hilaria, dont le livre porte le nom et ce n’est pas pour rien. L’histoire de cette femme peut traverser ces sujets sans problème : elle a fait de la prison (parce que ses fils étaient des « rouges »), a vécu directement le fascisme avec Franco, a subi les conséquences néfastes du capitalisme en tant que femme précaire, etc.

Ces éléments qui peuvent paraître anodins donnent de la matière, quelque chose de vivant, à des textes sur des problématiques connues pour certain·es d’entre nous. C’est un vrai travail de mémoire qu’a fait Irene (même si elle ne peut pas tout savoir, comme nous tou·tes à d’autres niveaux). Elle rappelle que l’Histoire n’est pas composée que de « grands » hommes (dont l’histoire est écrite par d’autres hommes) mais que des personnes du quotidien en sont aussi une bonne partie, et même une très bonne partie car sans elles, pas d’Histoire. J’ai trouvé ça très important de rappeler la valeur des « petits » car d’habitude, la majorité a été biberonnée à l’autre discours.

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Être femme en Asie, d’Anne Garrigue – les livres féministes #32

A la base, je tournais autour de sa première sortie en grand format mais je n’étais pas convaincue que je voulais payer ce prix-là (ce n’est pas une question de radinerie mais de pragmatisme – bon, un peu, si). Je l’ai donc en poche et par rapport au contenu, ça me satisfait.

Ce livre concentre donc des informations, principalement statistiques (et sourcées), sur l’évolution des droits des femmes en Asie, sur leur situation. Tout d’abord, l’ouvrage commence par un état des lieux général (niveau santé, éducation, politique), un peu comme une sorte d’introduction, puis parle de leur présence sur ce continent.

Il va forcément être question dans ce chapitre du fait que certains pays, comme la Chine et l’Inde, privilégient les foetus, bébés et enfants garçons et que ça crée un fossé dans le ratio filles/garçons naturel en faveur de ces derniers. Mais cela créera des problèmes sociaux dont on ne connaît pas encore l’étendue, bien qu’on perçoive déjà quelques dégâts : certains hommes vont acheter leurs femmes dans des pays étrangers. Je vous laisse imaginer les conditions… Et puis la dot, toujours présente dans certains pays, est une malédiction pour bon nombre de familles qui doivent payer. Du coup, quelle est la solution ? Avoir un garçon ! Et puis l’héritage, tout ça… Et même quand la dot n’existe plus, la tradition patriarcale est très forte…

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Tout le monde peut être féministe, de bell hooks – les livres féministes #31

Oui, ça fait neuf ans et demi que je suis féministe et je n’avais jamais lu bell hooks, lancez-moi des tomates. J’ai entamé ma découverte de l’autrice avec un livre qui me paraît, avec d’autres, faire partie de bonnes entrées au féminisme. C’était d’ailleurs le but avoué de l’autrice et c’est réussi.

Les chapitres parlent d’un sujet différent à chaque fois : le combat politique qu’est le féminisme, la sororité, le travail, la race et le genre, la violence patriarcale, les droits reproductifs, le mariage, etc.

Pour un livre sorti en 2000, la majorité du contenu de son livre est très actuelle, ce qui est assez triste en réalité, ça montre qu’énormément de choses n’ont pas changé en une vingtaine d’années. Que ce soit à cause des hommes (elle est assez sympa avec eux, on en reparlera) ou aussi à cause des femmes. Nous avons intériorisé le sexisme, le patriarcat et ce n’est pas parce que nous sommes des femmes et que nous vivons une oppression que nous sommes conscientes de tout et que nous ne pouvons pas la reproduire (y a pas mal de preuves de l’inverse).

Il faut aussi apprendre à déconstruire, surtout en tant que femme blanche, les rapports de race et de classe (et pas que mais je me contente de ce qu’elle dit ici) car ces derniers sont des entraves à la libération de toutes les femmes. Non, en parler ne détourne pas l’attention de vos chères valeurs de genre, c’est bon. Oui, c’est encore parfois un argument qu’on entend encore. (quand ce sont pas celles-là, ce sont les questions de classe dont les hommes blancs viennent nous rabattre les oreilles avec)

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Je me pose des questions sur mes articles de livres féministes

Hey ! Un petit article car je me pose des questions depuis un moment sur mes chroniques de livres féministes et je vais demander votre contribution plus tard dans l’article. Tout d’abord, je vais exprimer mes doutes.

Je ne sais plus vraiment quelle est la ligne de cette série d’articles, dans le sens où ce n’est pas forcément que des conseils. Par exemple, pour Clit Révolution : Manuel d’activisme féministe (Sarah Constantin et Elvire Duvelle-Charles), je critique clairement l’hypocrisie et l’indulgence des autrices, surtout par rapport à leurs (pas si anciennes ?) fréquentations islamophobes et transphobes, et pourtant, j’en ai bien rédigé une chronique (même si j’y ai exprimé mes doutes). Le mythe de la virilité (Olivia Gazalé), je ne le conseille pas forcément non plus : en lisant la chronique, je pense que vous avez compris que l’autrice nous la faisait un peu à l’envers quand elle saute rapidement à la conclusion qui l’arrange alors que la réalité est beaucoup plus compliquée que ça. J’ai aussi souligné sa transphobie (vous pouvez aussi rajouter son islamophobie et sa putophobie à la liste, dont je ne parle pas, ça fait un peu trop tout ça). Bref, je ne les conseille pas.

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Dix questions sur le féminisme, de Valérie Rey-Robert – les livres féministes #30

Je ne pense pas que les féministes qui viennent voguer par ici soient forcément intéressées par ce livre. Par contre, c’est un très bon guide pour les personnes qui n’y connaissent pas grand-chose sur le sujet ou qui ont des préjugés.

J’ai été agréablement surprise par cet ouvrage. Je le trouve très actuel dans ce qu’il aborde, je m’attendais à quelque chose de plus consensuel. Mais j’avais oublié qu’il avait été rédigé par Valérie Rey-Robert, autrice et tenante du blog Crêpe Georgette qui n’est plus à présenter pour les connaisseur·se·s.

Tout d’abord, l’introduction est très rapide (deux pages) où l’autrice donne une définition du sujet qui n’est pas bâclée comme on pourrait le croire. De plus, elle est ferme dans ses propos dès le début, ne laissant pas de place aux petits malins qui oseraient passer par là (on sait que non mais on ne sait jamais).

Le premier chapitre aborde l’histoire du féminisme (occidental, on ne va pas se mentir). Il permet de remettre les pendules à l’heure sur les rumeurs qui traînent… mais pas que sur l’histoire du mouvement. Ce sera le cas pour tous les autres sujets abordés sous le prisme du féminisme. Ça répond à l’argument « les féministes, c’était mieux avant ».

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Nos amours radicales – les livres féministes #29

Quand j’ai su qu’un tel livre allait être publié, je ne suis pas passée à côté. Huit personnes ont chacun.e écrit un texte sur leur vision de l’amour hétéropatriarcal. Ce dernier n’est pas aussi heureux qu’on ne veut nous le faire croire : c’est un lieu de reproduction des normes patriarcales après tout. De plus, il a tendance à être hiérarchisé au-dessus de tout type de relation, que dis-je, il y en aurait qu’une en plus (faux) : l’amitié qui, selon notre société, ne vaudrait pas grand-chose face à l’amour (hétéro, l’homophobie est une tradition dans ce pays).

Cet amour hétérosexuel monogame apporterait soit-disant le bonheur. Pour qui ? Là est la question… Enfin, pas pour les féministes. Nous, on sait quoi répondre. En tant que femme (c’est différent pour les hommes), on nous le vend depuis notre plus tendre enfance comme le modèle ultime à atteindre. Il y a une réelle injonction à être en couple (sans compter qu’il faut aussi construire le reste avec : habiter ensemble, avoir une maison, des enfants…).

Ce schéma peut ne pas plaire à des hommes, me direz-vous, mais là n’est pas la question par contre. Qui est vraiment lésé par ce genre de relations ?

Je pense qu’il est important de critiquer l’hétérosexualité politique, lorsqu’on est une femme qui a du désir, de l’attirance (physique, romantique et/ou sexuelle) pour les hommes cisgenres. Il en va de notre survie et de notre émancipation, le désir ne suffit pas à rétablir la justice et à éliminer tous les systèmes d’oppression.

– Sharone Omankoy

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